Comprendre la fragmentation des continents : nouveau scénario pour la formation de la marge du Mozambique
La fragmentation des supercontinents et plus généralement la rupture de la croûte continentale est un processus essentiel de la tectonique des plaques. Des chercheurs font le point sur le scénario de l’ouverture entre l’Afrique, l’Antarctique et Madagascar, au niveau de la marge du Mozambique.
Comprendre la fragmentation des continents
La tectonique des plaques s’illustre principalement par la valse des continents, qui se regroupent puis se séparent de façon cyclique. Les marges continentales sont ainsi les témoins actuels de la fragmentation de ces anciens supercontinents. L’un des plus connu est le Gondwana. Sa fragmentation, débutée au Jurassique, a donné naissance à l’Afrique, à l’Amérique du Sud, à l’Inde, à l’Antarctique, à Madagascar et à l’Australie.
L’étude des marges est donc essentielle pour comprendre l’évolution tectonique d’une région et pour reconstruire le mouvement des plaques au cours du temps. Mais rompre une croûte continentale est un processus lent et compliqué, qui implique souvent plusieurs étapes jusqu’à la création d’un nouvel océan. En effet, la rupture continentale fait intervenir de complexes interactions entre processus tectoniques et processus magmatiques, et il n’apparait pas toujours clairement quel est le mécanisme dominant.
Débutée il y a 180 millions d’années, l’ouverture océanique dans le bassin du Mozambique marque ainsi la séparation de l’Afrique, de l’Antarctique et de Madagascar. Cette dernière est caractérisée par une intense activité volcanique mais également par un développement oblique le long de grandes failles transformantes. La marge du Mozambique est donc un exemple typique d’une forte intrication entre processus tectoniques (développement de failles) et magmatiques (important épanchement de laves). Le détail de cette évolution est cependant encore mal connu et il n’existe actuellement pas de consensus sur le mouvement initial des plaques. La nature de la croûte demeure également sujette à diverses interprétations qui ne permettent pas de reconstruire avec précision l’emplacement des différentes masses continentales.
Figure extraite de l'article avec l'aimable autorisation des auteurs
Des processus profonds peuvent régir l’ouverture continentale
Dans ce contexte, la Natal Valley (sud Mozambique), qui est un segment de la marge mozambicaine, représente une région clé pour comprendre cette évolution, pourtant encore très peu documentée.
Dans une nouvelle étude, Vincent Roche (Institut des Sciences de la Terre de Paris) et ses collègues, se sont intéressés en détail à cette région. Par le biais de datation isotopique des roches, ils proposent un modèle d’évolution qui réconcilie processus tectonique et volcanique le long de ce segment. Ces nouveaux éléments permettraient de mieux contraindre les reconstructions des plaques tectoniques. Ils montrent également à quel point la dynamique du manteau peut régir les processus tectoniques de surface.
Leurs résultats, publiés dans Terra Nova, montrent que l’important volume de magma mis en place au niveau de la marge au début de son ouverture serait d’origine profonde. La rupture continentale au sud du Mozambique aurait ainsi été contrôlée par une remontée de manteau profond chaud, qui aurait notamment influencé le développement des failles mais également la mise en place de ces grands volumes de laves. Cette remontée de matériel chaud des profondeurs du manteau aurait été favorisée par l’héritage tectonique de la région, en particulier par une zone de suture entre deux cratons. Cette zone de suture aurait chenalisé ? favorisé la remontée du manteau, permettant la localisation de l’activité magmatique.
Cette phase d’extension fortement magmatique se serait ensuite terminée avec la mise en place d’un nouvel océan, l’Océan de Natal, il y a 160 millions d’années.
Résumé rédigé par Morgane Gillard.
Pour aller plus loin :
Gondwana break-up controlled by tectonic inheritance and mantle plume activity: Insights from Natal rift development (South Mozambique, Africa). Vincent Roche, Sylvie Leroy, Sidonie Revillon, François Guillocheau, Gilles Ruffet, William Vétel. Terra Nova, Volume 34, Issue 4, p. 290-304
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