Première image interne du nouveau volcan sous-marin, Fani Maoré, au large de Mayotte
Depuis 2018, le nouveau volcan sous-marin Fani Maoré situé au large de Mayotte est étudié sous toutes ses coutures, dans le but de mieux comprendre son origine et sa formation. Grâce à de nouvelles données sismiques, des chercheurs français ont pu étudier sa structure interne et retracer la chronologie des événements volcaniques. Ces données permettent notamment de réviser l’âge du début de la formation de l’île de Mayotte.
Naissance en direct d’un imposant volcan sous-marin
En 2018, les scientifiques assistaient en direct à la naissance d’un nouveau volcan sous-marin, à 50 km au large de l’île de Mayotte. Reposant à près de 3500 mètres de fond, ce jeune volcan nommé Fani Maore vient compléter la série d’édifices volcaniques formant l’archipel des Comores. Son éruption soudaine a cependant surpris la communauté scientifique, car aucune activité sismique ni volcanique n’avait laissé présager un tel événement.
Depuis 2019, plusieurs campagnes en mer se sont succédées pour essayer de mieux comprendre la dynamique de cette activité volcanique et son origine. De nombreuses données ont ainsi été collectées, notamment durant la dernière campagne menée en 2020-2021, SISMAORE. Si de précédentes observations ont mis en évidence le fait que le volcan est alimenté par un énorme réservoir magmatique situé en profondeur (plus de 37 km) et que l’éruption a été vraisemblablement initiée par une déstabilisation de nature tectonique, la structure même du système volcanique et la nature du socle sous le volcan ainsi que les étapes de la construction de l’édifice restaient largement inconnues.
C’est d’ailleurs toute la région nord du Canal du Mozambique, qui sépare l’Afrique du petit continent de Madagascar, qui est encore relativement mal connue.
L’intérieur du volcan révélé par les données sismiques
Grâce à l’acquisition de nouveaux profils sismiques dans la plaine abyssale où gît le volcan Fani Maore, les scientifiques de la campagne SISMAORE apportent aujourd’hui t de nouveaux éléments. Les données mettent en effet en évidence pour la première fois la structure interne du volcan mais permettent aussi d’affiner la chronologie des événements volcaniques dans la région et notamment la formation de l’île de Mayotte.
D’après les résultats, publiés dans la revue Comptes Rendus Géoscience de l’Académie des Sciences, il semblerait que la construction du jeune volcan Fani Maore soit associée à plusieurs éruptions successives à partir d’un unique conduit magmatique. Le gros de l’édifice aurait été ainsi mis en place entre mai 2018 et mai 2019. L’analyse stratigraphique des couches de sédiments présents sous le volcan suggèrent de plus que cette crise volcanique serait survenue brutalement après environ 4,6 millions d’années de calme dans cette zone.
Vue en 3D de la zone du volcan Fani Maore avec la ligne sismique interprétée MAOR21D01 en profondeur (Masquelet et al., 2022)
Mayotte aurait commencé à se former bien plus tôt qu’on ne le pensait jusqu’à présent
Plusieurs observations suggèrent cependant que d’autres événements volcaniques sont survenus dans un passé plus lointain. Les données montrent en effet l’existence d’un épais niveau basaltique plus en profondeur, associé à un complexe système d’acheminement du magma. Ces structures témoigneraient d’un important épisode volcanique qui pourrait correspondre au début de la formation de l’île de Mayotte. Cette observation signifie que cette île volcanique aurait commencé à se former bien plus tôt que ce que l’on supposait jusqu’à présent. À la place des 20 millions d’années avancés par de précédentes études, les chercheurs supposent que la construction de Mayotte aurait ainsi pu débuter il y a 27 millions d’années. Ce nouvel âge coïncide avec le début de l’activité volcanique en lien avec l’ouverture du Rift Est Africain, suggérant un intéressant lien génétique entre ces différents événements tectoniques et magmatiques.
Brève rédigée par Morgane Gillard
Pour en savoir plus :
Masquelet, C., Leroy, S., Delescluse, M., Chamot-Rooke, N., Thinon, I., Lemoine, A., Franke, D., Watremez, L., Werner, P., and Sauter, D. (2022). The east-Mayotte new volcano in the Comoros archipelago: structure and timing of magmatic phases inferred from seismic reflection data. C. R. Geosci. Special issue Mayotte https://doi.org/10.5802/crgeos.154
Egalement dans la rubrique
- Brève n°2 - Des grains de pollen pour reconstruire l’histoire des mangroves
- Brève n° 6 - Dater les plissements tectoniques à l’aide des veines et des failles qui affectent les couches
- Brève n°33 - De la matière organique continentale enfouie au fond des océans !
- Brève n°34 - Les vers de terre ont un rôle essentiel dans la minéralisation du carbone organique
- Breve n°35-Le volcanisme de Mayotte ne serait pas lié à un point chaud
- Brève n°37 - Volcanisme et tectonique découverts le long de l’archipel des Comores entre l’Afrique et Madagascar : Une limite de plaque en développement.
- Brève-n°38 - Au cœur de la structure des plagioclases : révision du formalisme thermodynamique permettant de modéliser le comportement de ces minéraux
- Brève n°39 - Des grains de pollen pour comprendre l’adaptation des arbres durant les dernières glaciations
- Brève n°40 - Déterminer la durée de la phase pré-éruptive d’un volcan grâce à l’analyse des roches volcaniques
- Brève N°23-01 - Expliquer la morphologie et le relief de la côte iranienne du Makran
- Brève_n°23-02
- Brève_n°23-03
- Brève_n°23-04
- Brève_n°23-05
- Brève_n°23-06
- Brève_n°23-07
- Brève_n°23-09
- Brève_n°23-10
- Brève_n°23-11
- Brève_n°23-13
- Brève_n°23-14
- Brève_n°23-15
- Brève_n°23-16
- Brève_n°23-17
- Brève_n°23-18
- Brève_n°23-19
- Brève_n°23-21
- Brève_n°23-22
- Brève_n°23-23
- Brève n°23-24
- Brève-n°23-25
- Brève_n°23-26
- Brève_n°23-28
- Brève_n°23-29
- Brève_n°23-30
- Brève_n°23-31
- Brève_n°23-32 - Plongée dans l’histoire tectonique fascinante des Caraïbes
- Brève_n°23-34
- Brève_n°23-35
- Brève_n°23-36 - Autopsie d’une dorsale ultra-lente : les processus d’exhumation disséqués
Chiffres clés
L'ISTeP comprend 108 membres dont :
- 12 professeurs
- 21 maîtres de conférences
- 2 directeurs de recherche CNRS
- 2 chargés de recherche CNRS
- 7 ATER et post-docs
- 26 doctorants
- 21 ITA-IATSS
- 17 collaborateurs bénévoles / émérites