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ISTeP - UMR 7193
Institut des Sciences de la Terre de Paris

Les failles crustales : un potentiel géothermique encore sous-estimé

 

 

Bien que la géothermie soit l’une des solutions de plus en plus mises en avant dans le cadre de la transition énergétique, son potentiel est encore très largement sous-estimé. Une nouvelle étude met en effet en lumière les capacités de certaines failles à abriter des réservoirs géothermiques « cachés ».

 

Un potentiel géothermique sous-estimé

Dans le cadre de la transition vers une production d’énergie décarbonée, la géothermie apparait comme une ressource essentielle. La capacité de production d’énergie géothermique a ainsi augmenté de 27% entre 2015 et 2020. En 2025, cette production pourrait même atteindre 20 GWe (gigawatt électrique) à l’échelle du globe, soit l’équivalent de 20 réacteurs nucléaires. Cette prédiction repose cependant sur nos connaissances actuelles des systèmes géothermaux. Ceux-ci sont généralement associés à des contextes géodynamiques bien particuliers associés à des anomalies de chaleur dans le sous-sol : zones volcaniques ou extensives d’origine tectonique (zone de rift par exemple). La plupart du temps, la prospection géothermale se fait ainsi dans des régions où les manifestations géothermiques sont évidentes (présence de fumerolles ou de geysers…). Or, cette approche pourrait s’avérer très restrictive, menant à une sous-estimation du potentiel géothermique exploitable.

Les zones de faille, d’importants réservoirs géothermiques potentiels

Une équipe de chercheurs s’est donc focalisée sur l’étude de systèmes géologiques qui pourraient abriter des ressources géothermales, mais qui pourtant ne présentent aucune manifestation en surface. C’est le cas notamment des failles crustales. La croûte, fortement endommagée, est affectée par un réseau de fractures interconnectées qui font de ces failles des structures perméables. La perméabilité est en effet un critère essentiel pour l’exploitation géothermale, un critère qui passe cependant souvent au second plan face au potentiel thermique. À titre d’exemple, les réservoirs géothermiques de faible perméabilité sont difficiles à exploiter et nécessitent l’emploi de techniques artificielles (« systèmes géothermiques améliorés », EGS) pour maintenir une circulation des fluides optimales. Ce type de techniques ne serait pas nécessaire dans les zones présentant une forte perméabilité, comme les zones de failles, qui servent de conduits naturels pour les fluides souvent réchauffés en profondeur. Plusieurs exemples montrent d’ailleurs qu’une activité magmatique n’est pas nécessaire pour la formation d’anomalies thermiques à faible profondeur. Il en résulte que les zones potentiellement exploitables pour la géothermie pourraient être bien plus nombreuses que ce que l’on supposait jusqu’à présent.

40 zones de failles favorables à la géothermie en Europe

Reste à pouvoir identifier ces « réservoirs cachés ». Habituellement, leur détection repose sur des mesures, dans les puits, de flux de chaleur ou de température, des données qui ne sont pas forcément disponibles. Une meilleure compréhension des paramètres permettant l’établissement d’un système géothermal au sein des zones de failles est donc nécessaire.

L’article publié dans la revue Comptes Rendus de l’Académie des Sciences discute ainsi du rôle de la perméabilité, de l’inclinaison et de la géométrie de la faille, de la topographie et du régime tectonique sur la circulation des fluides et des conséquences sur l’amplitude des anomalies thermiques en profondeur. En se basant sur des modélisations numériques, les chercheurs montrent que plusieurs paramètres influencent positivement l’établissement d’un réservoir géothermique dans les zones de failles. L’un des principaux concerne l’épaisseur de la zone endommagée, qui doit être idéalement supérieure à 100 mètres. Les chercheurs mettent également en lumière l’impact de la longueur de la zone de faille (au moins 1 kilomètre) ainsi que son déplacement cumulé (au minimum de 100 à 150 mètres). En se basant sur ces paramètres, les chercheurs identifient 40 zones de failles en Europe susceptibles de présenter un intérêt pour la géothermie. À l’heure actuelle, seules quelques-unes de ces zones de faille sont exploitées. Cette étude souligne donc l’énorme potentiel énergétique que renferme encore le sous-sol européen.

 

Brève rédigée par Morgane Gillard

 

Pour en savoir plus : Laurent Guillou-Frottier; Gaétan Milesi; Vincent Roche; Hugo Duwiquet; Audrey

Taillefer. Heat flow, thermal anomalies, tectonic regimes and high-temperature geothermal systems in fault zones. Comptes Rendus. Géoscience, Online first (2024), pp. 1-33. doi : 10.5802/crgeos.213.

 


Zones de failles en Europe possédant des caractéristiques favorables pour une potentielle exploitation géothermique (ronds de couleur). Les étoiles marquent les sites déjà en exploitation © Guillou-Frottier et al. 2023, Comptes Rendus Géoscience

 

 

11/10/23

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    20/09/18

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